L'histoire de York House
York House a servi d’Hôtel de Ville à Twickenham de 1926 à 1965 et, depuis 1965, de siège à la municipalité londonienne de Richmond-upon-Thames qui réunit les trois anciennes communes de Barnes, Richmond et Twickenham. Dans l’entrée, sont exposées leurs pièces d’orfèvrerie, dont deux de leurs trois masses d’armes, insignes de l’office de maire.
L’édifice a été préservé grâce aux efforts de l’association des amis de York House. Cette association, fondée en 1922, dissuada le conseil municipal de construire un nouvel hôtel de ville près de l’ancien, dans King Street. L’association fit ensuite campagne pour que la ville de Twickenham reçût la charte nécessaire pour devenir « municipalité ». Pour présider à la remise de sa charte en 1926, la municipalité fit appel au Duc d’York (1895-1952), devenu plus tard le roi George VI. Certains membres de l’association, dans leur enthousiasme, soutenaient qu’il y avait une relation entre le roi Jacques II et York House. Selon eux, les filles de Jacques II – plus tard, les reines Marie II et Anne – y vinrent régulièrement en visite chez leur grand-père, le Comte de Clarendon (1609-1674), beau-père de Jacques II. Il n’y a aucune preuve que ces visites aient eu lieu, d’autant que Lord Clarendon vécut en exil en France à partir de 1667. En fait, la maison tire son nom non pas de la famille royale anglaise mais de la famille qui, du 14ème au 17ème siècles, possédait la propriété appelée Yorkhold ou York Manor.
A l’origine, une porte, du côté nord-est, datant des années 1630, servait d’entrée à la maison qui constitue le noyau du bâtiment actuel (marqué en noir au verso). Par l’entrée principale, construite en 1897-8, le visiteur pénètre dans la salle à manger avec sa vieille cheminée de bois. Plus loin, se trouve le salon, appelé aujourd’hui « salle de la terrasse ». L’escalier du 17ème siècle est à moitié caché par l’ascenseur moderne. Andrew Pitcarne (mort en 1640), page puis écuyer du roi Charles Ier (1600-1649) en fut à la fois l’architecte et le premier propriétaire.
On doit le bâtiment actuel et ses jardins (voir le plan au verso) aux efforts des deux derniers propriétaires privés: le Duc d’Orléans (1869-1926), qui acheta la maison 13 000 livres en 1897, et Sir Ratan Tata (1871-1918), industriel et homme d’affaires indien, qui la paya 16 000 livres dans une vente aux enchères en 1906. La collectivité locale de Twickenham l’a achetée à sa veuve, Lady Tata, pour la somme de 20 500 livres, en 1924.
Le Duc d’Orléans, petit-fils de Louis-Philippe, dernier roi des Français, y était né en 1869 et y vécut de 1897 à 1906. Il fit construire l’aile nord-est de la maison, appelée aujourd’hui « Clarendon Hall », avec salle d’escrime, piscine et musée. On y voit partout la fleur de lys, symbole de la famille royale française et souvenir de son enfance. Son père, le Comte de Paris (1838-1894), avait lui-même habité York House de 1864 jusqu’à 1871 et avait agrandi le côté est de la maison par la construction du salon actuel et du jardin d’hiver. Le salon de style rococo fut ajouté au cours des années 1860 et sert maintenant de salle des fêtes. Inoccupée pendant plusieurs années, la maison est devenue, en 1876, la propriété de Sir Mountstuart Grant Duff qui la vendit au Duc d’Orléans en 1897.
York House, aujourd'hui. Photo ©Yvonne Hewett
Sir Ratan et Lady Tata y habitèrent de 1906 à 1918. Ils avaient aménagé la salle d’escrime et le musée, construits par le Duc, en galeries de peintures pour leur collection de tableaux, qui sont maintenant au musée de Mumbai en Inde. Après la mort de son mari, Lady Tata vécut à York House encore quatre années. Le duc et Sir Ratan ont transformé les abords et les jardins. Le Duc a incorporé au jardin le pré bordant la Tamise. Sir Ratan a créé la pelouse inférieure et remplacé le pont de bois qui enjambe la rue par un pont de pierre. En 1909, il fit installer la fontaine et les statues que les habitants de Twickenham appellent les « dames nues ». Ces sculptures sont en marbre de Carrare et représentent les « Océanides » ou nymphes de la mer dans la mythologie grecque.
Bien avant l’arrivée de la famille royale française, le bâtiment du 17ème siècle avait été agrandi du côté ouest au 18ème siècle. Récemment, cette partie a été aménagée en salle de réunions fonctionnelle pour le conseil. Les fenêtres ont été modifiées de façon à ce que l’ensemble respecte le style 18ème. Le second étage était probablement occupé par la famille du propriétaire et non par les domestiques. Comme il n’y avait pas de mansardes, les domestiques étaient probablement logés dans des maisons voisines.
Entre la fin du 19ème siècle et le début du 20ème, York House joua un rôle remarquable dans la vie sociale de Twickenham. Avant cette époque, entre 1720 et 1860, la maison fut ou inoccupée ou louée pour de courtes périodes. L’ambassadeur d’Autriche, le Comte Stahremberg, y habita de 1796 à 1807. Madame Anne Seymour, sculpteur et femme de lettres, loua la maison comme résidence d’été entre 1818 et 1828. Les autres locataires furent la Duchesse de Roxboroughe jusqu’en 1837 et le Comte de Lonsdale jusqu’en 1844. Sous Sir Mountstuart Grant Duff (1892-1906) et Sir Ratan Tata (1871-1918), la maison était renommée pour son hospitalité. Sauf pendant son séjour aux Indes comme gouverneur de Madras (1881-5), Sir Mounstuart recevait régulièrement ses amis pour des week-ends à Twickenham. Député aux Communes et ministre pendant le premier gouvernement Gladstone (1868-74), il joua un rôle important dans la vie politique nationale. Sir Ratan, philanthrope célèbre, dépensa beaucoup pour les pauvres et l’amélioration de la santé publique. Il aimait recevoir ses invités dans les jardins. Lors d’une grande réception, en juillet 1914, peu de temps avant le début de la première guerre mondiale, il reçut 1500 invités !
Les deux autres maisons de Twickenham, liées à la famille royale de France – Highshot House dans Crown Road et Orleans House au bord de la Tamise – n’existent plus. La première, habitée par Louis-Philippe pendant son premier exil de 1800 à 1807, fut démolie en 1927 ; la seconde, qu’il loua entre 1815 et 1817, après son retour en Angleterre, fut démolie en 1926. Il était revenu en visite en 1844 dans cette maison nommée en souvenir de sa famille. Son fils, le Duc d’Aumale, l’acheta en 1852. L’achat de York House par le Comte de Paris en 1864 et par le duc d’Orléans en 1897 porte à croire que la famille avait une certaine nostalgie pour la ville de Twickenham. Malgré les dépenses engagées, ce dernier partit après trois ans habiter à Wood Norton, près d’Evesham, maison héritée de son grand-oncle. Ce choix s’explique facilement, car il était devenu moins populaire parmi les habitants de Twickenham en raison de son appui aux Boers d’Afrique du Sud qui avaient pris les armes contre l’Angleterre (1899-1902).
La sœur du Duc, Amélie (1865-1951), perpétua les liens de la famille avec Twickenham. Comme le duc, elle avait été élevée à York House. Reine du Portugal, elle rentra en Angleterre après la révolution de 1910 avec son fils, le roi Manoel II (1889-1932). Ce roi exilé s’installa à Fulwell Park, autre maison « orléaniste » de Twickenham, démolie après sa mort.. Bienfaiteurs de nombreuses associations locales et fidèles paroissiens de l’église catholique St. Jacques de Pope’s Grove, Manoel et sa femme, Augusta, étaient très respectés à Twickenham. En compagnie du Duc de York, qui deviendra le roi George VI, Manoel assista à la cérémonie d’ouverture de l’hôtel de ville en 1926.
La maison sert toujours à des cérémonies et à des séances de commissions du conseil municipal ; En sortant par la porte principale, on peut voir, à gauche, le bâtiment administratif (le « civic centre »), bâtiment construit en 1987-91. D’autres bureaux sont dispersés dans la ville.
(Cette présentation était preparée par Prof Michael Lee, avec l’aide des membres du York House Society, de Dr. T.H.R. Cashmore et Anthony Beckles Willson, auteurs d’un monographie publié en 1990, ISBN 0 903341 51 4, et de Madame Joan Heath. Autres renseignements disponibles: Twickenham Museum )
|